Pléonasme ou apothéose ultime : Ibiza a la saveur et l’intensité d’une vie en harmonie avec l’art de vivre. Signe du destin ou coïncidence sublime : le Dandy allait faire la rencontre, à la descente de l’habitacle aéroporté qui l’emmenait, d’une jeune créatrice Nantaise dont la jolie marque, Famille Biscuit, a pour mantra « l’art de vivre à la Nantaise ». On adore. La vie est si bien faite. La vie est trop bien fête ! La magie d’Ibiza opérait en quelques secondes pour ne jamais quitter le cadran de ces 48 heures. Sa vie insulaire agit avec la puissance d’une vie insolente. Folie, fêtes et frénésie. Ibiza est une île de nuit – concept d’une immense boîte de nuit à l’échelle d’une île.
Ibiza ! Ibiza ! Hippie ça !
…les vendeuses de supermarché jouent au Puissance 4 sur le tapis de leur caisse et dissimulent une arme secrète : un tire-bouchon à portée de main, destiné à aider le Dandy en avarie. Arts de vivre.
Son inspiration de néophyte a une nouvelle fois conduit le Dandy au bon endroit pour déposer ses malles aux trésors vestimentaires, non loin des remparts, face aux plages de Figueretes, à l’extrémité d’un boulevard peuplé de supermarchés et de bars–restaurants de grande simplicité. Il entrepose dans le coffre-fort de sa chambre ce qu’il a de plus précieux : une teillebou de sky, des flyers et un nœud papillon Gwenn ha Du. Sens de l’accueil oblige, une table et un fer à repasser disposés là lui confirment que son séjour sera placé sous le signe de la sprezzatura, cet art exquis de la nonchalance et de l’élégance naturelle. Art qui sera fort remarqué. Jouant la carte pantalon rose / mocassins / chemise débraillée / veste aux boutonnières de manche ouvertes, les Dandys sont gratifiés d’un « mis amores » par un duo d’Espagnoles à la quarantaine fringante, tombées sous le charme.
De jour, il est inspiré d’arpenter la vieille ville d’Ibiza (Eivissa en catalan), legs architectural des temps de disette niché sur son rocher. La découverte se mérite, assurée par la force de mollets habitués à grimper les marches de la butte Sainte-Anne. Le spectacle y est splendide, la vue sur la marina et les terrasses des bâtisses superbe, les ruelles délicieuses, quartier de prédilection d’un célèbre couple d’artistes, Traspas y Torijano, qui hantent ces pavés glissants de leur présence tutélaire depuis les années 1970. Leurs portraits, de pied en cape, ornent les murs des échoppes touristiques. En ce dédale où il se faufile, le Dandy tombe, en un tour, sur la magie d’un bar-concept à l’étrange nom-mix : « Curry & Champagne » (Curry pour currywurst). Dommage qu’il ne l’ait pas testé !
Redescendu sur le port pour une indispensable halte gustative, avisant un drakkar qui descend sa voile ornée du symbole pirate, le Dandy rejoint le bus pour se rendre à l’autre bout de l’île, à l’ouest, à Sant Antoni de Portmany. Très détendus, disposant de l’autorisation de faire comme bon leur semble, les chauffeurs y diffusent une radio rock à des décibels jalousés par le Dynamo Café et abordent les ronds-points comme Goliath ignorant David. Ou ignorant Guetta, c’est la même. Très détendues, disposant de l’autorisation… (bis repetita), les vendeuses de supermarché jouent au Puissance 4 sur le tapis de leur caisse et dissimulent une arme secrète : un tire-bouchon à portée de main, destiné à aider le Dandy en avarie. Arts de vivre.
Lieu hors de prix pour un lieu hors du temps, le Café del Mar accueille à point nommé le Dandy pour le clou que constitue un coucher de soleil sur la mer. Ses compilations diffusées à une échelle planétaire ont fait la renommée du spot. C’est le son d’Ibiza qu’on aime. Il faut à présent poursuivre de l’autre côté de la baie, jonchée de clubs (de plage) avec jacuzzis, canapés, bars et murs de son, dont le O Beach Ibiza est une figure de proue. La suite de la soirée se déroule en rooftop au Sol House Ibiza, cocktails à la main, retrouvailles avec Famille Biscuit et ses nouvelles rencontres. À cet instant, le Dandy se rêve en Jacques de Bascher venu en villégiature sur l’île avec Kenzo. Maya dans du Lait de coco. Musique planante, délirante. Fermeture / ouverture des rideaux, on ne sait plus. Lit revisité en trampoline. C’est le Ibiza qui fait tourner la tête, plongée dans le noir. Dervallière en guise de lavallière. Rêverie apnéique. Chambre 538. Bespoke life. Autour, tout est bleu blanc blouge. C’est pesquetarien (astronautique). Le Dandy a vécu cette soirée Fast Love – « Ibiza mon amour » (Yves Michaud) – en mode too fast too far. Excès d’art de vivre. Le yogisme (pratique nocturne désinhibée de la méditation) a remplacé le Dandysme…
Retour à Eivissa, la ville.
Amis clubbeurs, oubliez les supermarchés de la nuit qui communiquent à grand renfort d’affichages. Amnesia, Pacha, Privilège, DC 10 ou Ushuaia : seul votre racket s’y déroule, sans jamais vous renvoyer les balles. T’as plus 100 balles ? Et pour cause : tout s’est évaporé dans la mousse, la vodka faisandée et un éphémère set de Dimitri Vegas et Like Mike. Rendez-vous plutôt à La Bodega, au pied des remparts, circulez dans les rues adjacentes à la découverte d’adresses plus authentiques, vous tomberez à l’improviste sur Franco Moiraghi, mythique et historique DJ d’Ibiza. Plus loin, sur la Plaça del Parc, une belle tablée d’Italiens en goguette menée par un maître ès sprezz’, vêtu d’une toge romaine à l’allure de robe de chambre, diffuse son propre son sur une enceinte portative. Vie et plaisirs Dandy suspendus à cette écoute et l’impromptu fabuleux de cette rencontre. Au croisement de ces vies festives, un groupe de Françaises venues de Dijon se retrouvent à vivre probablement leur plus belle soirée. Quelques heures plus tôt, elles rataient leur vol retour, happées par une trop grande sérénité. Il n’y a pas de hasard (de vivre) : leur hôtel se trouvait être le même que celui des Dandys.
À Émilie B.