Dans la légende du Dandysme, il existe certains moments de vie, inattendus, spontanés, joyeux qui, sur le coup, puis rétrospectivement, apparaissent comme fondateurs. Le Dandy doit au formidable et déluré Jean-Jo, magnifique hôte de feu les Comptoirs d’Armorique (rue du Maréchal-Joffre), l’un de ces instants suspendus : l’expérience du kilt. Un soir de franche et belle camaraderie attablée, enivrée par tant de mets et d’esprit jovial, Jean-Jo qui n’avait pas son pareil pour renifler les bons acolytes capables de le suivre dans ses aventures, avisa le Dandy et l’invita à se vêtir d’un kilt, toujours à disposition dans la réserve. La suite de l’histoire, pour floue qu’elle fut dans une telle rue où la fête est reine, n’en conserva pas moins le souvenir intact d’un sentiment absolu de liberté, d’audace et d’irrévérence.
Dans le monde de l’élégance masculine, qui ne s’arrête jamais de tourner, le kilt est au sartorialisme ce que la panenka est au tir au but…
Dans la légende du Dandysme, il n’y a pas de hasard, encore moins s’il est Nantais, il n’y a que des rencontres évidentes (oui, parfois le Dandysme a recours aux services d’une coach en développement personnel pour rédiger ses débuts de paragraphe). En 2019, le souvenir de Jean-Jo refait surface dans l’atelier de Romain : autodidacte et précurseur, Romain – qui a bien connu Jean-Jo lui aussi – s’est lancé dans la confection de kilts pour homme avec sa marque bien-nommée « Sous les jupes des hommes ». Dans le monde de l’élégance masculine, qui ne s’arrête jamais de tourner, le kilt est au sartorialisme ce que la panenka est au tir au but : une perle, une pépite, un sommet. Venu de contrées du nord de l’Europe, chargées d’histoire, de houblon et d’histrions, le kilt est trop souvent réduit au rang de folklore. C’en est fini ! La fantaisie est au pouvoir ! Cohabitation du punk et du chien (au sens, avoir du chien).
La légende du Dandysme s’écrit au futur entier rieur. Avec Romain, mais pas seulement : avec l’armée qu’il va lever derrière, devant, et autour de lui, le kilt, ou la jupe n’ayons pas peur des mots, va devenir l’indispensable élément de vestiaire de tout Dandy. Ainsi s’affirment l’aplomb et l’extrême sérénité de son porteur. Le secret de ce plaisir se dévoilera avec souveraineté : dans un kilt, on se sent bien, on se sent fringant et affranchi. L’air circule, le tissu vit sa vinaigrette, les plis jouent de l’accordéon. Enfin : une belle paire de mi-bas Bresciani ne pouvait entrevoir meilleure occasion d’être portée à sa juste valeur, elle qui désespérait de continûment faire de la figuration sous un pantalon en flanelle. Kilt à passer pour un Dandy : il faut donner une bonne leçon à tous les Tartan pions.
