C’est dans la discrétion, voire le silence tant ses habitants semblent parler bas, qu’Angers s’est faite. Première ville verte de France d’après l’Union nationale des coccinelles mirliflores, Angers est devenue tendance, Angers est devenue Dandy. Nombreux parcs, aménagement des bords de la Maine, jardin du Mail, belles terrasses de la place du Ralliement, tramway et surtout vélos connectés en libre-service, tout y est séduisant : le Dandy s’est senti comme un villégiateur habitué aux trains en retard ayant manqué le train d’avance. Mi-vigne mi-raisin, il ne lui a guère fallu de temps pour se regonfler les poumons d’envie afin de mener l’offensive dans la cité des Ducs d’Anjou. De sublime Playboy en détresse il a revêtu les habits du Renart chenapan qu’il est depuis sa plus tendre enfance, filou et futé, à tâton sans être tatillon, pour se fondre dans la nuit angevine.
S’il choisit de rester, attention d’Angers.
Profession de foi en poche (traditionnel voyageur), le Dandy est tout surpris de retrouver Jésus au James Joyce et enchanté d’y voir la belle communion des fidèles de cette adresse. Unanimement recommandé, le pub dispose d’une assez enviable collection de whiskys au bar de l’étage à faire soulever le kilt du Comptoir irlandais. La suite s’avère logique : direction La Chapelle. Clairement, on y entre moins pour la qualité de délivrance de l’hostie enivrante que pour découvrir une voûte musicale inédite dans son architecture. Jésus reviendrait en 2018, il s’écrierait : « Dj, entre tes mains je remets mon esprit », acclamé par une foule de Dandys qui n’attendaient plus que lui. Pâle à ses côtés figure la fresque du Boléro – pourtant objectivement superbe –, club dont l’architecture extérieure de l’immeuble vaut aussi le détour. Le lieu a tout ce qui fait le raffinement de son espèce : clientèle féminine disparate aux t-shirts écarlates, style musical évasif sinon évadé, fauteuils et tables disponibles grâce à l’absence de preneurs de teillebous, charme de l’ancien disruption du moderne. Le Boléro c’est le barrio et si derrière le Tapas 100 balles (rue de la Roë) est ouvert ça part en retournage de cabeza. Le Dandy opte plutôt pour la déambulation matinale qui permet d’aviser la jeunesse sur le retour. Ultime validation d’un critère essentiel à son classement des villes de France : excellent état d’esprit des noctambules angevins.
Tant la ville est sereine, on peut parfaitement s’y lever vers 16h du matin sans rien manquer de sa journée. De toute façon, un Dandy se couche quand les musées ouvrent. Au Jardin des Plantes, des étudiantes assises sur un brin de pelouse ou à califourchon sur un banc pensent mieux assimiler un arrêt de la Cour de Cassation quand elles sont placées sous le regard inquisiteur des passants détachés de toute examinatio. Sur une vitrine, le Dandy découvre le logo d’Angers French Tech : un renard. Chenapan, que fais-tu là ? On t’a cherché toute la nuit. Signe du festin. La promenade du Bout du monde sera, pour cette fois-ci, le bout du chemin. Terrasse déployée, Chez Pont-Pont fait de l’œil enclin à employer les meilleurs arguments pour y déposer ses armes. Face au Château, le Dandy fait rempart à son corps défendant. S’il choisit de rester, attention d’Angers.
À Mariella